Zoom sur les recommandations en portion et en sucres des céréales pour petit-déjeuner
Sur tous les emballages de céréales ultra-transformées pour petit-déjeuner, le fabricant donne les apports nutritionnels par portion de 30 g de produit.
Cette portion de 30 g a souvent été décriée par les nutritionnistes comme étant irréaliste puisque bien faible par rapport aux quantités réellement servies et consommées (voir cette émission sur les céréales pour petit déjeuner à 16 min).
Pour le fabricant, cette faible portion permet de minimiser les apports en sucres.
Maintenant, pour davantage de sérieux, la portion de 30 g devient la portion recommandée journalière. Vous noterez le dessin où le personnage se sert avec une cuillère à soupe…
Les céréales industrielles ultra-transformées possèdent maintenant une gamme issue de l’Agriculture Biologique…
Le bio est trop souvent considéré comme une marque de qualité. Pour rappel, le label AB garantit une agriculture sans usage de produits chimiques de synthèse mais ne garantit pas un produit alimentaire nutritionnellement sain !
Zoom sur les recommandations en sucres
Tout d’abord essayons d’y voir plus clair dans les différentes recommandations et de mieux les différencier car aucun consensus entre les multiples organismes concernés (Union Européenne, ANSES, OMS…) n’apparait vraiment en termes de sucres totaux, ajoutés, sucres libres, sucres naturellement présents…
Pour les sucres totaux
Les apports recommandés (AR) concernent les apports recommandés en nutriments pour un adulte-type (2000 kcal/jour) et sont utilisés comme valeurs de référence pour l’étiquetage des produits alimentaires (AR fixés par réglementation européenne).
Pour tout sucre confondu (sucres ajoutés et sucres présents naturellement dans les aliments), l’AR en sucres est de 90 g.
Quant à l’ANSES, elle «recommande aux adultes de ne pas consommer plus de 100 g de sucres totaux par jour (hors lactose et galactose) et pas plus d’une boisson sucrée (en privilégiant les jus de fruit). »
Pour les sucres ajoutés/libres
En France, les apports nutritionnels conseillés (ANC élaborés par l’ANSES) en sucres ajoutés (ici page 21) sont évalués au maximum à 10% de l’apport énergétique total, soit 50 g de sucres pour la même ration-type à 2000 kcal/jour. Cette quantité de sucres correspond également à celle recommandée par l’OMS, chez l’enfant et l’adulte, comprenant « tant les sucres ajoutés que les sucres naturellement contenus dans les jus de fruits», sous l’appellation de sucres libres (ici page 22).
La consommation française en sucres par rapport à ces recommandations ?
Une étude de 2017 montre qu’une forte majorité des enfants (83 % !) consomme des quantités de sucres libres supérieures aux recommandations de l’OMS, contre 41 % chez les adultes.
Ce pourcentage est décroissant avec l’âge : 92 % chez les 3‑6 ans à 21 % chez les 65‑75 ans.
Cette même étude aborde également l’optimisation de la diète qui passe, sans surprise, par la diminution des produits sucrés, jus de fruits et autres boissons sucrées, et une augmentation de consommation de fruits, légumes et eau !
La consommation française en sucres par rapport à ces recommandations ?
Les sucres contenus dans les produits alimentaires transformés sont ajoutés. Aussi je propose de comparer les quantités en sucres ajoutés de ces produits avec les recommandations d’apports en sucres ajoutés, soit les ANC (voir tableau).
*Calculs à partir des données de l’enquête du CLCV sur les céréales du petit-déjeuner destinées aux enfants (p. 8) : variation de teneurs en sucres présentes dans un échantillon de 105 céréales pour petit-déjeuner et dans une portion de 30 ou 50 g.
Il est plus intéressant (minimisation de l’apport en sucres) pour les fabricants de considérer une portion de 30 g et de comparer les apports en sucres sur les AR et moins sur les ANC… de parler de 14 % des AR en sucres (au plus) pour 30 g, que de parler de 40 % des ANC en sucres pour 50 g.
A côté de l’apport en sucres élevés des céréales pour petit-déjeuner, l’autre paramètre important est l’index glycémique élevé de ces produits (enquête du CLCV) :
« Le dernier avis de l’Anses concernant l’actualisation des repères du programme national nutrition santé précise qu’il est important de limiter les apports en sucres et de privilégier les glucides complexes à faibles indices glycémiques (IG). L’indice glycémique (de 0 à 100) mesure l’élévation du taux de sucre dans le sang après la consommation d’un aliment contenant une quantité de glucides donnée. Or, les céréales pour petit-déjeuner destinés aux enfants sont généralement des produits à fort IG. Ceci combiné avec les sucres ajoutés peut expliquer que bien souvent les céréales ne rassasient pas longtemps. »
En effet, un élément à prendre en compte (en plus des sucres ajoutés) est la notion de transformation des céréales et de leurs chaînes de glucose (glucides ou amidon) au cours du processus de fabrication, principalement la cuisson-extrusion. La cuisson-extrusion a pour résultat une modification importante de la structure de l’amidon.
Gélatinisé, dépolymérisé et fragmenté, l’amidon extrudé est digéré beaucoup plus vite, ce qui explique l’augmentation de l’index glycémique des produits transformés extrudés par rapport aux céréales non-extrudées.
En conclusion
Au-delà de cette querelle sur des recommandations chiffrées en sucres (totaux, ajoutés, libres) et laquelle choisir pour évaluer une portion de céréales trop sucrées, il est juste de bon sens (critique) en général :
- de ne pas confondre sucres ajoutés ou sucres libres des jus de fruits et les sucres contenus naturellement dans les fruits et légumes
- de distinguer féculents à IG bas et haut de distinguer céréales ultra-transformées et féculents bruts/peu transformés/peu raffinés
- de réfléchir à ce qu’on mange
- d’avoir un esprit critique
- de se rappeler que « sans bannir ces produits », il est important de les utiliser selon un usage averti et limité !